Réalisations multi-médias

En collaboration avec Dóra Kiss pour la chorégraphie et la danse et avec Joël Mützenberg pour les arts visuels.
Notamment au sein de Honey & Milk, collectif d’artistes fondé en 1992 dans l’idée de produire des spectacles unissant différents médias.
La préoccupation première de Honey & Milk est de promouvoir un art qui s’adresse à l’être tout entier. C’est pourquoi Honey & Milk ne présuppose pas de hiérarchie entre les divers moyens mis en œuvre pour la réalisation d’un spectacle.

Le départ et (1993) pour flûte à bec, danse et arts visuels (durée : 20 min).

L’arrivée des voyageurs a été écrite par Dominy Clements en mai 1992. Dans sa brève introduction à la pièce, le compositeur appelle de ses vœux une interprétation chorégraphique de celle-ci et invite le flûtiste à bec, au cas où cette proposition est retenue, à ajouter un prélude et un postlude à la pièce proprement dite, cela à partir de la répétition d’une mélodie qu’il a écrite à cet effet.
En travaillant cette mélodie, je n’ai pu me résoudre à une répétition pure et simple et j’ai commencé à imaginer une utilisation de la mélodie comme prétexte à une forme plus élaborée. A ce stade, il m’a semblé que c’était de moins en moins à la création d’un prélude que j’avais envie de travailler mais à une pièce autonome, sorte de réponse à la pièce de Dominy Clements. Il m’a paru plus honnête alors de revenir à l’idée – conforme aux indications du compositeur – d’un prélude basé sur la répétition de la mélodie et d’écrire une nouvelle pièce.
Il était logique qu’une réponse à L’arrivée prenne forme de Départ. De même, L’arrivée des voyageurs étant un titre emprunté à un collage de Max Ernst, je me suis dit que Le départ et pourrait lui-aussi avoir son image.
La réponse en Départ à L’arrivée a forme d’antécédent.
L’antécédent sembla devoir être De Chirico.
A ce moment, la question de savoir ce qu’allait être cette image n’était pas très importante, un jeu de départs et d’arrivées était lancé, et avec trois acteurs : musique, peinture, danse.

Le matériel que j’ai utilisé pour composer Le départ et a deux origines.
D’un côté, un matériel abstrait inventé de toute pièce sous la forme d’une série dont l’unité mélodique de base, le quart de ton, permet un mélange étroit entre mélodie et linéarité créant un sentiment d’ambiguité entre immobilité et agitation.
De l’autre, l’emprunt de deux mélodies à L’arrivée des voyageurs. L’une étant la mélodie servant à l’introduction « répétitive », l’autre un motif « signal » qui ponctue la pièce par son retour constant…
Les deux fragments sont utilisés dans une version rétrograde mélodiquement à laquelle est appliquée l’ordonnance rythmique de la version originale.

La structure de la pièce : un archipel d’îles et de récifs dans une mer de silence.
Les fluctuations du matériel sériel, qui passe d’une organisation en quarts-de-tons à une organisation en demis-tons puis en tons, permettent de faire ressentir l’apparition des îles et des récifs non pas comme des objets finis mais comme le dévoilement momentané d’une structure ininterrompue, souterraine.

L’utilisation de la technique du souffle continu dans cette pièce sert aussi ce propos.
Le projet : que se profile de plus en plus clairement le relief thématique de L’arrivée. Cela par une insertion progressive des différents constituants de la thématique empruntée.

L’effet de genèse du Départ et est donc dû à la fois à l’affirmation graduelle de la série par l’agrandissement successif de ses intervalles constitutifs, et au fait que de cette fluidité émerge petit à petit la thématique empruntée à L’arrivée.
Le départ et-L’arrivée des voyageurs se rencontrent au moment où la note finale d’une mélodie rétrograde se transforme – tout naturellement – en note initiale de la mélodie originale.
A ce point, c’est comme si, à la frontière entre les deux pièces, on se rendait soudainement compte que le parcours que l’on vient d’effectuer l’a été à reculons. On se retourne alors pour continuer…